N° 713 | Le 17 juin 2004 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
Voici réunies sous la férule du docteur Sassolas et pour notre plus grande satisfaction, les contributions des intervenants au onzième cours sur les techniques de soin en psychiatrie organisé courant 2002 par l’association Santé mentale et communautés. C’est l’occasion de constater pour le lecteur issu du champ médico-social que les craintes qui traversent le monde du soin psychiatrique mais également la philosophie qui inspire les pratiques sont étonnamment similaires à celles que connaît le champ social et médico-social.
Stanislas Tomkiewicz, récemment décédé, retrace l’histoire récente de la psychiatrie et donne un peu le ton général de l’ouvrage. Après l’asile, institution totale par excellence, les mouvements d’antipsychiatrie et la psychothérapie institutionnelle ont bouleversé les manières d’appréhender le soin psychiatrique. Le malade, trop souvent malmené auparavant par le pouvoir excessif de l’institution, a trouvé, enfin, une véritable place de sujet dans les dispositifs thérapeutiques actuels. Le développement d’une psychiatrie extra-hospitalière visant explicitement à lutter contre les effets pervers de l’institutionnalisation a largement contribué à cette évolution positive.
Pour autant, tous les problèmes ne sont pas résolus puisque, semble-t-il, des menaces d’un autre type se font jour. La psychiatrie n’échappe pas aux dérives gestionnaires et à la séduction d’une réponse chimique (et économique en terme de coûts) à la manifestation des symptômes. La vigilance est donc de mise. Sans doute faut-il, comme l’indique un autre auteur, accepter pour une part la démarche économique sans renoncer fondamentalement à l’éthique. Difficile pari en vérité qui suppose de diversifier les modes de prise en charge, de rationaliser les réponses aux besoins, d’améliorer l’inter connaissance des acteurs grâce, en particulier, à un travail en réseau.
Cependant, comme le signale une infirmière cadre il reste primordial de « replacer sans cesse et avec une vigilance active le patient au centre de nos préoccupations et résister à la captation institutionnelle ». Garder présent à l’esprit que la qualité des soins est bien l’objectif ultime de l’institution psychiatrique, quelle que soit sa forme, c’est aussi une manière d’affirmer une position parfaitement légitime que mêmes les principes gestionnaires les plus argumentés auront bien du mal à contester.
L’ouvrage présente d’autre part des contributions plus orientées sur les modalités propres à la prise en charge psychiatrique et le contenu des « stratégies » thérapeutiques contemporaines. Le lecteur avide de connaissances en ce domaine y trouvera donc aussi largement son compte.
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