N° 1325 | Le 18 octobre 2022 | Critiques de livres (accès libre)
La pensée queer
Bisexuel, pansexuel, polyamoureux, genre neutre ou fluide, transgenre… les frontières explosent entre l’hétérosexualité et l’homosexualité, entre le masculin et le féminin. Les figures du genre, construction éminemment culturelle, se déclinent à l’infini à travers de multiples êtres et essences parcourus par une interrogation permanente. L’évidence naturelle et figée est remise en question au profit d’une création personnelle, d’une invention de soi et d’une identité plurielle, composite et fluctuante, pétrie de mouvements, de changements, d’interactions, de perméabilité, de processus et de flux : être homme ou être femme, l’un et l’autre, l’un puis l’autre, un peu de l’un, un peu de l’autre, ni l’un, ni l’autre. On est là dans un aggiornamento : toute l’architecture de la pensée humaine et toute l’histoire de l’humanité avec ses mythes et ses productions culturelles fondées sur la binarité et la distinction des sexes sont dès lors ébranlées. Il n’appartient plus ni à l’État, ni à la religion de déterminer comment mener son existence. La légitimité se loge aujourd’hui dans la pluralité et la diversité. L’anormalité, la tare et la maladie sont du côté de l’homo/transphobie. Autrefois être compétent, c’était être conforme. Dorénavant, c’est être soi-même. La pathologie de la contrainte d’hier devient l’angoisse d’être soi. La synthèse dressée ici de la passion identitaire est éloquente.
Jacques Trémintin
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