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🖋 Tribune pour la prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e ‱ Le peuple surgit

Par le groupe de travail intersyndical d’Ă©ducateurs de prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e - Marseille, ArdĂšche, Paris et Haute Savoie.


RĂ©forme des retraites, loi Darmanin, loi Kasbarian Berger, loi olympique, dissolution des soulĂšvements de la terre, marche blanche attaquĂ©e, interdiction de la marche Adama, menace de l’état d’urgence
 Tout ça, accompagnĂ© de violences policiĂšres, de discours politiques dĂ©nigrants, de racisme dĂ©complexĂ© et d’une fachosphĂšre qui se lĂąche. ÉniĂšmes bavures policiĂšres, 14e homicide pour un refus d’obtempĂ©rer depuis 2022. Et aprĂšs, on se demande pourquoi la population n’en peut plus ? Pourquoi serait-ce diffĂ©rent dans nos quartiers populaires ? Oui, la jeunesse est notre avenir. Et que leur donne-t-on ? On ne voulait pas les entendre ? Ils ont trouvĂ© le moyen de la rĂ©volte. On ne leur laisse pas d’espace pour s’exprimer ? Et lĂ , vous les entendez ? On les fait rĂȘver de capitalisme et de sociĂ©tĂ© de consommation ? Ils et elles s’en prennent Ă  ces symboles inaccessibles, attaques significatives de leur prĂ©carité 

Sentiment d’injustice
L’espace public est criminalisĂ©, quel lieu pour elles et eux, quel espace de libertĂ© ? Nous vivons le rĂ©sultat de l’immense nĂ©gation de la colĂšre des jeunes.
Plusieurs colÚres légitimes se sont cumulées.
Mais qui est en mesure de les entendre ? Qui veut les entendre ? Et, qu’en fait -on ?
Nous, travailleurs et travailleuses du social, constatons une réelle défiance vis-à-vis des adultes en général, un vrai manque de confiance, une déception.
Vous ĂȘtes choquĂ©s par les attaques des lieux publics ? Mais que reprĂ©sentent-ils pour notre jeunesse ? On leur interdit la conscience politique. On ne veut surtout pas qu’ils et elles questionnent trop, qu’ils et elles aient un esprit critique. Quel avenir leur propose-t-on de construire ensemble ?
Le sentiment d’injustice est omniprĂ©sent
 la retraite, pas une priorité  le climat, beaucoup de beaux discours
 Mais quels actes ? Les jeunes n’auraient pas voix au chapitre ? Ils et elles sont oubliĂ©.es alors que ce sont elles et eux qui vont subir les dĂ©cisions que la sociĂ©tĂ© prend aujourd’hui.
Et ce serait seulement la faute des parents ? Faut-il rappeler que le rĂŽle parental est un apprentissage du quotidien, jamais facile, peu importe le milieu ?
La rĂ©ponse judiciaire est disproportionnĂ©e. Attention Ă  ne pas instrumentaliser les quartiers populaires ! DĂ©passons les images mĂ©diatiques et les reprĂ©sentations.
Ces mouvements ne sont que peu ou pas organisĂ©s, il n’y a pas de chef, cependant il y a des responsables et nous les connaissons !

Alerte !
Nous alertons sur la faillite des services publics et le contexte économique et social catastrophique depuis des années.
L’école est malade. L’hĂŽpital est en danger. La protection de l’enfance est prĂ©carisĂ©e. Il y a un dĂ©sengagement de l’État partout.
Comment faire sociĂ©tĂ© ensemble ? Interrogeons la relation au monde des jeunes en tant que sujets politiques.
Nous, Ă©ducs de prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e, ne voyons pas les jeunes comme agresseurs et dĂ©linquants, mais comme notre futur. Nous rappelons l’ordonnance de 45 : l’éducatif doit primer sur le rĂ©pressif.
Au quotidien nous construisons avec le public des outils pour lutter contre toutes les discriminations, le mĂ©pris de classe, le sexisme et le racisme. En favorisant la participation des jeunes et de leurs familles et la prise de conscience de leur pouvoir d’agir, la prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e contribue Ă  dĂ©velopper une dynamique territoriale qui reconnaĂźt qu’ils sont les premiĂšres ressources de leur environnement (DSL, aide Ă  la crĂ©ation d’association, engagement dans l’existant).
Nous revendiquons que la prise en compte de l’avis des populations ne soit pas qu’un discours de façade et que nous ne soyons pas des agents de tranquillitĂ© publique. À travers notre travail nous laissons la place Ă  la parole des mis Ă  l’écart.

Un rĂŽle holistique de transformation sociale
Les Ă©ducateurs de prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e jouent un rĂŽle holistique : ils et elles agissent au quotidien pour favoriser l’orientation des jeunes et des familles vers le droit commun et les acteurs jeunesse, santĂ©, hĂ©bergement, suivi Ă©conomique et social, loisirs ...etc.
Or nous constatons unanimement, et ce depuis des annĂ©es la dĂ©gradation des capacitĂ©s et conditions d’accueil dans toutes ces structures, sans exception. La psychiatrie, l’hĂ©bergement d’urgence, l’animation, la protection de l’enfance, la mĂ©decine gĂ©nĂ©raliste, les CCAS et tant d’autres sont tous sans exception, touchĂ©s par des baisses d’effectifs et de places d’accueil.
Dans chacun de ces services il est demandĂ© aux professionnels de faire plus avec moins, de maintenir une qualitĂ© d’accueil (tout juste dĂ©cente parfois) sans avoir les moyens pour le faire. L’impact social et psychologique sur les jeunes et leur entourage est extrĂȘmement dĂ©lĂ©tĂšre et ne fait que renforcer la fracture entre eux et la sociĂ©tĂ©. La consultation et la prise en compte de la parole, de l’expertise et des pratiques des diffĂ©rents acteurs jeunesse sont essentielles dans la construction des politiques pour la jeunesse et les familles. La prĂ©vention spĂ©cialisĂ©e est un pivot de l’action sociale et ancre ses luttes dans un objectif de transformation sociale.
Posons-nous donc la question d’un changement de paradigme, en prenant en compte que l’accompagnement humain ne peut et ne doit pas ĂȘtre une variable d’ajustement des politiques sanitaires et sociales, et doit devenir un engagement sur le long terme, guidĂ© par une vision humaine et inclusive de la sociĂ©tĂ©.