N° 558 | Le 4 janvier 2001 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Violences scolaires. Les enfants victimes de violence à l’école
Pascal Vivet & Bernard Defrance
Pascal Vivet le précise d’emblée : « La grande majorité des enseignants accomplit son travail avec compétence et professionnalisme » (p.12). Il ne s’agit donc pas ici d’un brûlot anti-enseignants, mais d’une approche des phénomènes de violence à l’école, à partir d’un changement de perspective. Car, reconnaissons-le, cette question est toujours traitée de la même façon, que ce soit par les médias, l’opinion publique ou les responsables politiques. Un prof qui se fait cracher dessus fait l’objet de bien plus de sollicitude qu’un élève qui se fait humilier, dénigrer ou insulter par son maître. En fait, il ne faut banaliser aucune de ces deux formes de violence qui sont également intolérables et ne pas s’appuyer sur l’une pour dénier ou minimiser l’autre. Pour autant, il n’y a guère de travaux pour mesurer la situation des enfants et adolescents en tant que victimes des adultes : les auteurs font en cela ?uvre innovante.
Pascal Vivet nous livre son expérience de six années à la tête d’une cellule de protection de l’enfance d’un conseil général. Les signalements qu’il a eus à traiter étaient pour la moitié d’entre eux, issus d’établissements scolaires. Quant à Bernard Defrance, professeur de philosophie, il est connu au travers notamment de ses précédents ouvrages, pour le travail qu’il accomplit sur la mémoire du vécu de ses élèves qu’il incite à s’exprimer dans des écrits libres. En cette fin de millénaire, il existe encore de ces institutrices qui terrorisent les enfants au point de transformer la vie à l’école en véritable enfer : enfermement dans un placard quand on n’est pas sage, bouche scotchée plusieurs heures si on est trop bavard, corps attaché sur la chaise avec une corde si on est trop turbulent. Il y a encore de ces chefs d’établissement qui ferment les yeux sur les violences subies par certains bouc émissaires de la part de leurs camarades de classe ou qui couvrent les harcèlements sexuels d’adultes pervers en prétextant qu’il s’agirait d’agissements accomplis « sans le faire exprès, peut-être pour s’amuser ».
Ce qui est en cause ici, ce ne sont pas tant des comportements individuels qu’il est difficile d’éviter complètement, mais la complaisance dont ils bénéficient parfois tant au sein même du milieu professionnel et de leur administration. Les réactions qui ont néanmoins lieu sont dans certains cas appropriées, mais trop souvent, elles sont lourdes et disproportionnées : « L’institution scolaire se révèle défaillante en termes de soutien psychologique et pédagogique à l’égard des membres qui la composent ». Il reste beaucoup à faire pour faire avancer les protocoles de traitement de ces violences. On peut, en outre, concevoir tout l’intérêt qu’aurait l’organisation de modalités de travail pour que les enseignants cessent de fonctionner dans la solitude et l’isolement, ou la conception d’une charte éthique ou d’un code de déontologie.
Dans le même numéro
Critiques de livres