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■ ACTU - Personnes handicapées : les députés refusent l’autonomie

Le 13 juin, deux cents personnes rassemblées à Paris se sont opposées à un amendement contre l’individualisation de l’Allocation aux adultes handicapées. Le 17 juin, jour du vote du texte en seconde lecture, l’Assemblée nationale l’a adopté.


Le 13 juin, picketing sur la place de l’Hôtel de ville à Paris
« Fierté handi, ma dignité, mon autonomie  » ; « je ne partage pas mon handicap, mon AAH non plus  ». Les slogans claquaient le dimanche 13 juin sur les pancartes des personnes handicapées, des collectifs et des associations rassemblés sur le parvis de l’Hôtel de Ville de la capitale à l’appel d’Act Up-Paris. Au programme : picketing – action consistant à tourner en rond sur la place pour interpeller les passants -, prises de parole et die-in « afin d’offrir aux regards de celles et ceux qui méprisent nos existences une idée de l’insupportable négation à laquelle nous sommes condamnés », insiste Act Up-Paris.

Colère

Le 13 juin, rassemblement à l’appel d’Act Up-Paris


Des manifestants très en colère : le 9 juin, répondant à l’injonction gouvernementale, la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a rejeté la déconjugalisation de l’Allocation aux adultes handicapés (AAH), balayant ainsi la volonté légitime des personnes qui en bénéficient de vouloir vivre dignement de manière indépendante. Et ce malgré les mobilisations incessantes et un élan de soutien citoyen.
Le 13 juin, die-in sur la place de l’Hotel de ville pour interpeller les passants


Créée en 1975 pour garantir l’autonomie financière des personnes handicapées, l’AAH n’est pas un minimum social mais une prestation. « Un substitut à une incapacité de travailler à cause du handicap  », rappelle Fred Navarro, activiste, militant et ancien co-président d’Act Up-Paris. Pourtant aujourd’hui, l’AAH est calculée en fonction des revenus du conjoint, rendant ainsi la personne en situation de handicap dépendante de lui. En février, l’association qui se bat depuis longtemps pour sa déconjugalisation, a interpellé publiquement sénateurs et députés sur Twitter ; en mars, appelé à une mobilisation devant le Sénat ; en juin, publié un Plaidoyer pour une véritable mesure de justice sociale et un name shaming sur Twitter avec #lemurdeshandiphobes. « Je ne comprends pas pourquoi Emmanuel Macron et Sophie Cluzel [secrétaire d’État en charge des personnes handicapées ] bloquent à ce point. Individualiser l’AAH permettrait de ne pas subir la domination d’un conjoint. Si la personne handicapée n’est pas en mesure de participer aux charges ou aux frais liés aux enfants par exemple, elle devient le Sujet de son conjoint. Si celui-ci est violent, elle ne pourra pas le quitter faute de ressources », s’énerve Fred Navarro.

Abattement

Les manifestants réclament l’individualisation de l’AAH à Paris le 13 juin


Le gouvernement a déposé un amendement à la disposition concernant l’individualisation de l’AAH votée en première lecture le 13 février 2020, confirmée par le Sénat. Il réintroduit la prise en compte des ressources du conjoint. « Il remplace l’abattement actuel de 20 % par un abattement forfaitaire d’environ 5 000 euros, explique Carole Salere, conseillère nationale Travail, Emploi, Formation et Ressources à l’association APF France Handicap. Cela pourra améliorer la situation des couples aux tout petits revenus mais pas celle des autres et cela pénalisera les couples avec enfants. » Mais surtout, cela ne répond pas à la demande principale des personnes concernées : l’individualisation des ressources. Le 15 juin, la commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a interpellé les députés sur «  l’atteinte aux droits fondamentaux que constitue l’actuel calcul de l’AAH  ». Elle rappelle que la France sera examinée par l’ONU cet été sur ce point. Malgré tout cela, le 17 juin, jour de l’examen du texte en deuxième lecture, l’amendement a été adopté. «  Ne parlons pas des conditions d’adoption du texte à l’Assemblée nationale ce matin avec une stratégie d’obstruction du gouvernement à travers l’organisation d’un vote bloqué qui constitue un déni de démocratie pour tous les observateurs », ajoute Carole Saleres.

Katia Rouff-Fiorenzi