N° 1225 | Le 20 mars 2018 | Critiques de livres (accès libre)
Non, tous n’ont pas vécu dans « l’enfer des foyers ». Il suffit, pour s’en convaincre de lire le récit de Pierre Duhamel qui y a passé douze ans. Aujourd’hui, il vit heureux, intégré et père de deux enfants. S’il a voulu mettre des mots sur son enfance, c’est pour tenter de se libérer du vécu traumatisant qui l’a marqué.
Mais ce n’est pas aux éducateurs qu’il en veut. Certes, constate-t-il, « certaines personnes diplômées en travail social n’ont rien à y faire ». Mais la plupart sont des « gens formidables » qui lui ont apporté « des moments de joie ». S’il a souffert, c’est de l’attitude de ses parents. Longtemps il a cru qu’il avait mérité ses placements et qu’il en était responsable. Son père signa très tôt un document signifiant sa volonté de l’abandonner. Quand l’auteur chercha à le retrouver, il se rendit compte qu’il n’avait en face de lui que l’ancien mari de sa mère. Le terme de « papa » lui a été insupportable jusqu’à la naissance de son premier enfant. Sa mère n’a jamais su le protéger et l’a nourri de biberons remplis de « carences affectives ». Il s’en est sorti en s’appuyant sur des tuteurs de résilience : ses instituteurs à qui il voue une forte reconnaissance, mais aussi son éducatrice qui ne l’a « jamais trahi, ni menti, ni laissé tomber » et est devenue depuis une amie qu’il revoit.
Tous les enfants placés ne vivent pas de la même façon leur placement. S’il en a souffert, c’est du fait de l’abandon. Et il mesure « la chance qu’il avait d’avoir vécu cette protection de ne pas vivre chez ma mère ». C’est sans doute le besoin de rendre ce qu’il a reçu qui le mena à préparer et obtenir le diplôme d’éducateur spécialisé, travaillant un temps en protection de l’enfance. Beau témoignage et bel hommage à la profession.
par Jacques Trémintin
Le bal des aimants ou le parcours d’un enfant placé
Pierre Duhamel, éd. L’Harmattan,
2017, (231 p. – 24,50 €)
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