N° 1238 | Le 29 octobre 2018 | Critiques de livres (accès libre)
Banlieue mon amour
Rarement, il m’aura été donné de lire une telle concentration de tendresse, d’humour et de poésie dans un roman à la fois attachant et poignant, sensible et nostalgique. Issa, le narrateur, nous fait découvrir son univers avec une bienveillance et une candeur qui apprivoisent la cruauté du monde qui l’entoure.
Même s’il est né « à côté de ses pompes », il réussit à parler avec une telle acuité de réalités à la fois simples et essentielles que leur formulation serait sans doute bien plus fade exprimée par des esprits plus conformes. Découvrir ces scènes souvent cocasses, parfois dramatiques à travers les yeux de cet adulte différent procure un vrai bonheur. Il nous parle de la vie dans un quartier de banlieue. Il nous montre la solidarité qui s’y déploie. Il nous illustre ce qu’est la véritable amitié. Il nous dresse le portrait de personnages improbables qui y vivent : Blafart qui devient Sylvia, Madame Do Santos qui sait tout sur tout le monde, Mo son meilleur ami qui finira en prison. Il donne toute sa place aux chats et aux hirondelles. Il nous rapporte les quatre cents coups de sa jeunesse. Il nous décrit la confrontation avec la police. Il nous évoque le travail dans une usine où sont abattus et préparés des poulets. Il nous conte les émois de la vie amoureuse, le plaisir de devenir père, le désespoir de la rupture parentale. Il nous dépeint la détresse du cancer. Toutes choses qui pourraient être banales, exposées par tout autre que lui.
Dans un style faussement naïf et simpliste, mais toujours rythmé et ciselé, l’auteur nous fait rire et nous émeut, nous accroche et nous bouscule, nous remplit de bienveillance et d’humanité. Une lecture à surtout ne pas manquer pour une raison essentielle : elle fait du bien.-
Jacques Trémintin
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