N° 1284 | Le 24 novembre 2020 | Critiques de livres (accès libre)
L’interdisciplinarité au service du travail social
Gilles Allières, Stéphane Saint André
Renoncer à la toute-puissance
Le travail en partenariat est devenu la dernière injonction à la mode. Voilà un ouvrage essentiel qui, en écartant l’écume, lui préfère une conceptualisation fertile, illustrée par une application innovante. Le travail social n’étant pas un univers de l’entre-soi, de l’unilatéralité et de renfermement, il est intrinsèquement appelé à pulvériser les cloisons entre les disciplines humaines qui l’alimentent. Entre la mono-disciplinarité stérile qui a pu s’imposer et la transdisciplinarité utopique qui reviendrait à fusionner toutes les approches, il y a la pluridisciplinarité (ou multidisciplinarité) qui se contente de les additionner. Bien différente est l’interdisciplinarité qui propose l’interpénétration des différentes démarches entre elles et avec le savoirs pratiques. Ce paradigme peut aussi s’appliquer au rapprochement des différents secteurs du monde socio-éducatif qui fonctionnent trop souvent en silos. C’est ce qu’applique le dispositif brestois Muta’jeunes qui fonctionne, depuis 2007. Les ados incasables, dont les fragilités narcissiques poussent à la destructivité et à l’agressivité, mettent en échec tous les professionnels. Seule solution pour réussir à les accompagner : admettre que personne n’est en capacité d’y arriver seul. Développer l’interconnaissance et la confiance entre les intervenants, élaborer des références partagées et préserver les capacités à penser passent par l’acceptation de son incomplétude et donc de la place d’autrui, par la dialectisation des conflits tant intra qu’inter institution et par l’inscription dans la temporalité longue. Croiser les expertises, introduire une dose d’altérité comme ressources pour sortir de l’échec et réfléchir en commun constituent des pistes fécondes pour travailler ensemble.
Jacques Trémintin
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