N° 1059 | Le 19 avril 2012 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

Nous sommes tous la France ! Essai sur la nouvelle identité française

François Durpaire


éd. Philippe Rey, 2012 (143 p. ; 15,20 €) | Commander ce livre

Thème : Immigration

La France connaît une véritable crise d’identité, les occasions de partager le sentiment d’appartenir à la même communauté se faisant de plus en plus rares. L’auteur avance plusieurs explications possibles. L’une d’entre elles renvoie à l’histoire de la constitution de notre nation. La lutte contre les particularismes notamment provinciaux, le passé colonial fondé sur une ambition civilisatrice et l’idéal universaliste ont laissé bien peu de place à la reconnaissance des spécificités et des disparités considérées comme autant d’obstacles à l’unité nationale. Un autre ressort est à rechercher du côté de ces préjugés qui tendent à caractériser chacun(e), non sur la base de son appartenance commune à l’espèce humaine, mais à partir de regroupements basés sur l’ethnie, la religion ou l’apparence extérieure : « Nous sommes des individus, non des couleurs ou des’’races’’ » (p.42).

Et François Durpaire de proposer, avec ironie, de mesurer la taille des délinquants pour tenter d’identifier, celle qui prédisposerait aux infractions ! Mais il y a aussi ces deux pulsions nichées au fond de nous : l’instinct de conservation, tout d’abord, qui nous incite à défendre nos privilèges et l’instinct du mouvement, ensuite, qui nous incite à rechercher le progrès. Ayant posé son diagnostic, l’auteur esquisse toute une série de pistes traversées par la même quête : au-delà du comment vivre ensemble, la question à se poser n’est-elle pas du pourquoi vivre ensemble ?

Et d’apporter de multiples réponses convergentes : affirmer que ce que nous avons de commun avec le reste du monde compte davantage que les différences qui nous en séparent ; reconnaître que la diversité enrichit les liens au lieu de les distendre ; accepter que la pluralité n’affaiblit pas le sentiment national, mais au contraire le renforce ; assumer la possibilité pour les individus de revendiquer plusieurs appartenances et références, sans qu’il n’y ait ni à hiérarchiser l’une par rapport à l’autre, ni à exiger d’en renier une pour être légitime à arborer l’autre.

Cette « pluri-identité », un champion du monde du 110 mètres haies, comme Ladji Doucouré, la concrétise, lui qui porte, lors des compétitions, une chaussure aux couleurs de la France et l’autre aux couleurs du Mali et du Sénégal. Refuser cette multiple affiliation, c’est contraindre à « choisir entre la négation de soi-même et la négation de l’autre », affirme Amin Maalouf. Tout au contraire, explique François Durpaire, dire que nous sommes tous la France, ce n’est plus seulement se référer à une situation juridique (la possession des mêmes papiers d’identité), ce n’est pas non plus dénier les spécificités culturelles (ou vouloir les gommer), c’est affirmer qu’il y a un « nous » qui transcende nos identités particulières.


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