N° 1187 | Le 9 juin 2016 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Jusqu’à la fin du 20e siècle, la vie affective et sexuelle des personnes avec handicap s’est heurtée au tabou et au déni tant des familles que des professionnels, pour qui seule l’imposition de l’abstinence semblait légitime. La stérilisation constitua, longtemps, la forme la plus aboutie d’un contrôle externe sur la fécondité. La représentation de la personne handicapée privilégiait les images de l’ange ou de la bête, asexuée de naissance ou dotée de pulsions irrépressibles. Mais les réticences à lui accorder le bénéfice du droit commun provenaient aussi de la nécessité de protection face à des êtres particulièrement fragiles et vulnérables.
Ces deux arguments ont été battus en brèche. D’une part, la grande majorité de ces personnes ont montré leur aptitude à respecter les codes sociaux, manifestant leur sensibilité à l’interdit et leur capacité d’assimilation des modèles à suivre. D’autre part, ce qui s’avère dangereux, pour les personnes avec handicap comme pour les valides, ce n’est pas tant la sexualité en elle-même que les abus et les viols, les agressions et les atteintes. Les seules limites qui puissent être fixées relèvent du consentement réciproque et de l’atteinte à la dignité ou à l’intégrité de la personne. Le même principe s’applique à tous : la vie affective et sexuelle constitue un besoin fondamental quel que soit l’âge, le handicap ou le lieu de vie. Les règlements intérieurs des établissements interdisant toute vie sexuelle sont illégaux.
Même si elles ne doivent pas renoncer au devoir de protection, les pratiques professionnelles doivent cesser de vouloir suppléer totalement la personne dans le choix de ce qui est bon ou non pour elle. Et l’on doit arrêter d’équiper les chambres destinées aux adultes de lit de 90 centimètres de large !
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