N° 1208 | Le 25 mai 2017 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Les formateurs en travail social n’avaient jamais eu leur monographie. Voilà qui est fait. Se fondant sur sa thèse de doctorat, Christophe Verron passe au scanner ce groupe social aux contours flous, qui lui aussi est confronté au contrôle managérial, à la standardisation des pratiques et au renforcement bureaucratique du cadre réglementaire.
Posons le contexte. On compte 460 établissements de formation agréés, 3 500 formateurs préparant plus de 63 000 étudiants à 14 diplômes allant du niveau V (CAP) au niveau I (Master). Le marché très concurrentiel de la formation pour adultes place aux côtés des écoles traditionnelles, des Institut Régionaux de Travail Social et des Instituts de Formation Sanitaires et Sociaux, des lycées professionnels, des IUT, des GRETA et des MFR, rendant d’autant plus complexe la lisibilité du secteur. Deux tiers des formateurs possèdent un diplôme professionnel et ont exercé en moyenne une quinzaine d’années. Leur itinéraire passe par l’accueil de stagiaires, la participation à des jurys de sélection ou d’examen, les interventions comme vacataire, l’accompagnement de mémoires et/ou l’analyse de pratique, avant d’être recruté par cooptation endogène, quand une place se libère. Alors que la réglementation ne l’impose pas, ils poursuivent des études pour répondre aux exigences de qualification. L’autre tiers n’a pas d’expérience professionnelle, mais possède un diplôme universitaire.
Être formateur, c’est consacrer 34% de son temps en prise directe avec les étudiants, 40% en préparation et 13% en lecture-recherche. Reste un temps non négligeable en relation avec les partenaires, la représentation de l’institution et les tâches administratives. Aucune formation n’est dédiée à cette nouvelle mission dans laquelle le formateur se jette à son arrivée, en s’ajustant et apprenant à faire. Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, la fonction ne constitue pas l’aboutissement d’une carrière, mais une étape, avant d’accéder à un poste de cadre dans un établissement. Le groupe de formateurs n’a jamais réussi à se construire collectivement, étant confronté à une grande hétérogénéité liée à une segmentation par métier et filière et par niveau de qualification.
L’avenir des formateurs se trouve à la croisée des chemins, plusieurs scénarios potentiels s’avérant possibles : l’intégration à l’université, la transformation en formateurs d’adultes non spécialisés, au contraire la spécialisation par familles professionnelles ou encore une reprofessionnalisation renouant avec l’expérience de travailleur social.
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